Pages

dimanche 23 septembre 2012

Les dimanches de l'abbé Béthléem 12: mai 1909

Douzième épisode (et non des moindres, vous allez être gâtés cette semaine!) de notre exploration de Romans-Revue dirigée par l'Abbé Bethléem qui proposait au début du XXe siècle une lecture morale (rigoriste même) des parutions récentes (voir la présentation sur ArchéoSF).
Cette semaine, le mois de mai 1909.

Pour ce qui concerne notre domaine, ce sont trois oeuvres que nous relèverons: Le Rour de Pierre Souvestre et Marcel Allain (un roman délirant à lire absolument!), La Cité du sommeil de Maurice Barrère et un texte d'anticipation militaire de  Gaudin de Villaine paru dans un périodique.


La partie consacrée à l'étude d'un périodique (dont bien peu trouvent grâce aux yeux des collaborateurs de Romans Revue) porte en mai 1909 sur le journal L'Auto. Grand périodique sportif, il comporte aussi des textes littéraires et parmi les rédacteurs on trouve Pierre Souvestre, créateur de Fantômas par exemple :

M. Pierre Souvestre, ayant sans doute entendu parler du ROMAN DE RENARD a voulu moderniser les légendaires personnages de Renard, Brun l'ours et dame Cigogne et il nous a donné une suite de contes incompréhensibles, bêtes à faire pleurer, où, l'on ne sait, qui l'emporte de l'invraisemblance dans les idées ou de la niaiserie prétentieuse dans le style

Retenons surtout cette critique du Rour (l'auteur ne donne pas le nom des auteurs mais ce sont bien Pierre Souvestre et Marcel Allain qui écrivirent ce roman délirant) dont les faiblesses signalées par l'auteur de l'article (Léon Jules) sont précisément ce qui fait le bonheur des lecteurs d'aujourd'hui:

Je signale, dans le même ordre de mérite littéraire, le ROUR, roman-feuilleton paru dans I'AUTO, en janvier, février et mars. J'ai lu beaucoup de romans et de plusieurs sortes : je dois à la vérité de. dire que jamais je n'en ai lu qui, de près ou de loin, ressemblassent à ce ROUR. C'est incompréhensible et fou d'un bout à l'autre. Le personnage principal est un individu qui joue simultanément trois personnages différents, et ce, grâce à certains secrets de haute alchimiequ'il a découvert dans l'Inde. Il est à la fois un convenable jeune homme, - un vieux savant, et en réalité un pauvre avorton humain. Il a inventé et tient à sa disposition de mirifiques instruments qui lui permettent de voler dans, les airs, de naviguer sous l'eau et de se donner, à volonté, toute l'énergie et la vigueur physique dont il a besoin. Il commet crimes sur crimes et meurt enfin, victime de son immoralité, après avoir hypnotisé, séquestré et presque tué une jeune fille. C'est absurde, immoral, et aussi étranger à la littérature que les boniments abracadabrants, d'un quelconque prestidigitateur forain.
Dans la section "A travers les Romans du mois", un «roman pour les grandes personnes», l'anticipation La Cité du sommeil de Maurice Barrère dont l'action se situe en 2250.

Voilà le roman curieux, étrange, extraordinaire. Voici venir le buffle des buffles.Donc, en 1950, à Paris, arbitré des élégances, on a inventé un sérum qui endort pour 300 ans. Les dormeurs sont couverts d'une cloche en verre, avec, à côté d'eux, le sérum qui les réveillera 300 ans après, en effet, ils ouvrent des yeux étonnés sur le monde transformé.
Machines volantes, fauteuils roulants, plus de routes, des maisons ambulantes, plus de domestiques, tout à l'électricité, même la cuisine et la police, la paix aux ménages,des antiquaires qui vendent pour chefs-d'oeuvre des plaquesd'assurance de 1950, des croûtes pour des Bougereau, des grands liseurs qui lisent les pensées à travers l'espace ; voilà le spectacle qu'offre la France de 2250.Mais Jumiés, le député socialiste, l'un des revenants de trois siècles, essaie de troubler l'ordre avec la complicité d'un savant. On les fait sauter tous deux, et la ville entière. Cataclysme. La sérénité revient. Certains dormeurs se font endormir de nouveau pour 300 ans. Un jeu sans fin, quoi !Mais le romancier ne les réveille plus. Ce sera pour un prochain roman sans doute.


La rubrique nécrologique cite l'illustrateur Caran D'Ache, l'un des précurseurs de la bande dessinée:

CARAN D'ACHE, de son vrai nom Emmanuel POIRE, (1858-1909), célèbre, dessinateur et caricaturiste qui avait fourni une quantité énorme de dessins à diverses publications illustrées. On ne pouvait pas dire qu'il fût roué ou cynique, mais il était de ces gens qui se sont mis délibérément en dehors de toute morale établie et racontent, avec une simplicité enfantine, toutes sortesd'actions qui n'ont presque jamais que les sens pour mobile.

La revue des périodique signale la parution de ce texte dans Le Correspondant daté du 10 avril 1909:
GAUDIN DE VILLAINE. En cas de guerre, l'invasion du Cotentin.
Après recherches, il s'avère qu'il s'agit du récit d'une attaque future de Cherbourg par la voie terrestre et l'on retrouve des Allemands utilisant des brigades cyclistes comme l'imaginait le Capitaine Danrit dans Le cyclisme militaire aujourd'hui et demain. (texte de Danrit disponible dans la section Téléchargement d'ArchéoSF)


A dimanche prochain! 

A lire sur ArchéoSF:



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire