Les parutions de livres relevant du merveilleux scientifique ou du roman scientifique ont toujours fait l'objet de critiques au moment de leur parution. André Laurie avec Les Exilés de la Terre n'échappe pas à la règle...
M.
Laurie a emprunté à M. Jules Verne sa méthode d'exposition et ses
procédés dramatiques, de manière à mélanger avec beaucoup d'art
les éléments scientifiques et les éléments romanesques.
Certes,
M. Jules Verne aurait eu le droit de refaire lui-même, sous une
forme un peu différente, son Voyage à la lune.
Rien de plus original que le Voyage à la lune de
M. Jules Verne ;
mais la répétition de cette œuvre excellente ne peut plus rien
avoir d'excellent, ni d'original, et M. Laurie avait peut-être plus
de ménagements à garder dans l'imitation qu'il donne.
Voici
pour la critique. Mais nous devons, après ces dures observations,
auxquelles les auteurs de livres d'étrennes sont peu habitués,
louer sans réserve le talent de M. Laurie. L'idée première est
bien curieuse. Un jeune savant français suppose que, l'attraction et
l'électricité étant deux forces de même nature, on pourra, avec
de très forts courants électriques, développer assez de force pour
exercer une attraction jusque sur notre satellite lunaire. La lune
n'est pas très loin de nous. Pourquoi ne serait-elle pas alors
attirée ? Donc notre savant, après divers incidents sur
lesquels nous n'insisterons pas, va s'établir sur une montagne
isolée de la Nubie, et là, à l'aide e machines dynamo-électriques
mues par la force solaire, il actionne un immense aimant. Alors la
lune, lentement attirée, descend vers la terre ; un choc
formidable a lieu, et voilà l'imprudent ingénieur, avec toute sa
petite colonie, y compris les traîtres (puisqu'il faut toujours des
traîtres), entraîné dans la lune. L'odyssée de ces hardis
explorateurs dure quelques temps. Mais l'oxygène manque,
et, comme il faut survivre, on fait machine arrière. Aussitôt, par
un simple contact électrique, l'attraction s'exerce de nouveau de la
lune à la terre, si bien que nos voyageurs, quittant la lune
inhospitalière, reviennent sur le globe terrestre.
Bien
entendu, cette sèche description, que nous donnons en quelques
lignes, ne peut rendre, même de loin, toute la saveur du livre de M.
Laurie. La fable qui accompagne les détails scientifiques est fort
bien imaginée. Bref, en laissant de côté la trop grande similitude
avec l'une des ouvrages de Jules Verne, nous avons là un livre
d'étrennes à la fois instructif et amusant.
« Causerie
bibliographique » in Revue scientifique,
1888
Les Exilés de la Terre est disponible dans la collection ArchéoSF (version numérique)
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