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lundi 26 mars 2018

Henry de Graffigny, Ce que nous verrons dans vingt ans (1923)

Vulgarisateur et romancier, Henry de Graffigny fut particulièrement productif (allant jusqu'à plagier d'autres auteurs comme Octave Bleunard pour Electropolis). Il collabora régulièrement à la revue pour la jeunesse Le Petit inventeur (retrouvez les autres articles consacrés à cette publication parus sur ArchéoSF en cliquant ICI).
Il imagine dans le texte qui suit l'avenir dans le domaine des transports.






Ce que nous verrons dans vingt ans

Les progrès de la science ont été considérables depuis un demi-siècle, et chaque jour voit apparaître une invention nouvelle, une découverte imprévue qui ajoute un maillon de plus à la chaîne ininterrompue de conquêtes, transformant peu à peu l'existence des nations, ajoutant au bien-être général, bien qu'au prix de quelques complications.
Énumérons sommairement ces améliorations.
En premier lieu, les moyens de locomotion. En 1875, on ne connaissait que les chemins de fer et les voitures à chevaux et les « rapides » parcouraient au plus soixante kilomètres à l'heure. Aujourd'hui, les grands expresse internationaux ont une vitesse commerciale qui dépasse 90 kilomètres ; aux lents et lourds omnibus, ont succédé les tramways électriques et les autobus à pétrole qui circulent dans toues les grandes villes. Alors que, sur mer, les plus grands paquebots avaient un déplacement de 5.000 tonnes et une vitesse de 16 nœuds (29 kilomètres) à l'heure, maintenant leur volume est sextuplé et leur vitesse doublée. Enfin, alors qu'on ne connaissait que l'on ballon sphérique, jouet du vent, on possède des dirigeables et les avions évoluant à des allures dépassant 200 kilomètres.
C'est dans le domaine de l'électricité que les progrès ont été plus nombreux, grâce à une étude minutieuse des phénomènes auxquels donne lieu cette forme de l'énergie universelle. Il n'est presque plus d'industrie qui n'en soit tributaire et ne l'utilise sous une forme ou une autre. La lampe à arc, puis la lampe à incandescence ont remplacé les anciennes sources d'éclairage. La bougie, l'huile, et même le gaz qui soutient difficilement sa concurrence grâce à l'invention du manchon de terres rares imaginé par le docteur Auer. La traction, la métallurgie, la chimie ont pris un développement extraordinaire grâce à l'invention de la dynamo, et les procédés de correspondance ont été notablement perfectionnés, ainsi qu'en témoignent la télégraphie avec et sans fil, la téléphonie ordinaire et la radiotéléphonie. Enfin l'art médical a également trouvé dans la fée électricité une aide précieuse ; une branche nouvelle du plus haut intérêt a été créée par la découverte des rayons X, et la radiologie seconde efficacement les recherches et les opérations chirurgicales. Et nous ne sommes qu'au commencement ! Que nous réserve l'avenir ?…


Il semble évident, et sans qu'il soit nécessaire de se livrer à des « anticipations », à la façon de Jules Verne ou de Wells, qu'avant que vingt ans ne soient écoulés, bien des problèmes encore pendants auront reçu leur solution.
En premier lieu, il est probable que la navigation aérienne sera d'une usage universel, la sécurité des passagers étant assurée plus complètement que maintenant. A côté des monstres aériens, les « Goliaths » et des « Léviathans » pour les transports en commun à grande vitesse, évolueront les « moto-aviettes », cycle-cars de l'atmosphère, servant aux transports individuels comme fait la bicyclette actuelle.
Sur terre, la locomotive à vapeur sera devenue désuète et aura cédé le pas, sur tous les réseaux de chemins de fer, au tracteur électrique. Grâce à l'emploi des moindres cours d'eau, des marées, etc,… la houille blanche, bleue ou verte permettra non seulement d'électriser toutes les lignes ferrées de grand ou de faible trafic, mais encore de distribuer l'énergie motrice aux moindres exploitations agricoles. Le moteur électrique supplantera ainsi les moteurs thermiques d'entretien d'entretien plus coûteux, aussi bien pour la traction des véhicules que pour les usages à poste fixe.
Il est probable que, sur mer, pour les relations entre continents que séparent de vastes océans, les moyens de locomotion seront tout différents de ceux que nous connaissons, et que la vitesse et la sécurité seront sensiblement accrues. Le sous-marin de transport et commercial rivalisera peut-être alors avec le paquebot géant, tandis que, sur les fleuves, évolueront à grande allure les hydroglisseurs à hélice aérienne.

Mais il n'y a pas que la locomotion et la navigation maritime ou aérienne, qui se seront développées et transformées dans le court laps considéré, il en sera de même de tous les procédés industriels et de nombre d'applications scientifiques qui découleront des découvertes nouvelles surgissant chaque jour dans le monde entier. Les habitations seront plus rationnellement construites, avec des matériaux plus parfaits, mieux répartis et judicieusement mis en œuvre si bien que l'incendie ne sera plus autant à redouter qu'aujourd'hui, ses ravages pouvant être instantanément circonscrits. Et dans ces maisons modèles tout se fera automatiquement, comme dans la « maison électrique » de G. Knap. Le confort atteindra un degré dont on ne peut encore se faire qu'une idée approximative : il suffira d'appuyer la main sur un levier ou un bouton de commande pour être obéi et réaliser les opérations les plus compliquées, car la télématique encore dans l'enfance en 1923 sera avant 1950 devenue d'un usage général.
Le monde continue à évoluer et les inventions les plus merveilleuses se succèdent qui contribuent à précipiter cette évolution. On peut se figurer ce que seront les cités futures lorsque seront appliquées en grand toutes ces conquêtes de la Science, qui transforment lentement mais radicalement nos conditions d'existence.

H. de Graffigny, « Ce que nous verrons dans vingt ans »,

in Le Petit inventeur n° 30, 9 octobre 1923. 

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