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samedi 25 avril 2020

Jean Frollo, Les jurons (1888)

Utiliser une date anticipée pour parler du présent est un moyen fort en usage dans la presse.
Dans Le Petit Parisien du 23 janvier 1888, Jean Frollo publie un long article sur l'usage du juron dans lequel il se projette dans l'avenir, imaginant le regard d'archéologues des temps à venir sur une opérette ; parle du passé et du présent (constatant que l'on ne jure pas plus qu'avant d'ailleurs).
Son article est introduit par ces mots:

Les jurons 

Supposons que, dans trois mille ans, quand notre aimable langue française sera devenue une langue morte, un archéologue, remuant la poussière des bibliothèques afin d'y découvrir des documents sur les mœurs de ce temps, tombe sur une collection de vieilles opérettes et que, parmi celles-ci, se rencontre la pièce que vient de représenter le Théâtre des Bouffes-Parisiens l'érudit qui aura mis la main sur ce texte précieux se fera, convenez-en, une assez singulière idée de l'éducation des jeunes filles à la fin du dix-neuvième siècle.
Le principal personnage de cette opérette est une luronne fille de soldat à qui l'habitude des jurons militaires a fait donner le surnom de «Mam'zelle Crénom ». Afin de ne point laisser s'égarer en de trop fâcheuses hypothèses les érudits de l'avenir, hâtons-nous de témoigner ici que «Mam'zelle Crénom » ne saurait servir de type aux petites pensionnaires de la génération actuelle, et que ce n'est pas l'habitude de nos jeunes tilles fussent-elles filles de soldat d'entremêler leur langage de jurons, même fortement atténués, comme celui que les auteurs de la pièce ont prêté à leur héroïne.[...]

Jean Frollo, "Les jurons", Le Petit Parisien, n° 4104, janvier 1888. 


A lire dans la collection ArchéoSF, le recueil des premiers textes mettant en scène des archéologues des temps futurs (1755-1756) :

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