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mercredi 20 décembre 2023

Dik, Extrait du journal Pierrette n° du 20 décembre 2023 (1923)

Le journal humoristique Pierrette publié en Indochine (Saïgon) annonce la couleur dès l'en-tête: il s'agit en effet du "seul journal quotidien ne paraissant que deux fois par mois".

 

Dans le numéro du 15 décembre 1923, on trouve une très courte anticipation, signée Dik, annonçant pour décembre 2023 la disparition de Paris 







vendredi 10 mars 2023

Le Valet de Pique, Montélimar en l'an de grâce 2023 (1923)

Le 10 mars 1923 (il y a tout juste cent ans), une chronique d'anticipation, signée "Le Valet de pique" paraissait dans le Journal de Montélimar. Le rédacteur y imaginait l'avenir lointain de la ville et invitait en conclusion le lecteur à vérifier l'exactitude de ses prévisions. Vérifions donc!

 


 

Or, en l’an 2023, soit, exactement, un siècle après la fugitive éclosion des actuelles violettes. Montélimar, s'appelait. Nougat-City.

Cet évènement, indique clairement, qu'à 1 exemple de la généralité des nations Européennes, la vieille ville des Adhémar, suivant la contagion des mœurs nouvelles, avait payé, à « l’Américanisation » moderne, son regrettable tribut.

Nougat-City, toujours coquette, s’étageait encore, au flanc d une riante colline, mais ses demeures spacieuses, pourvues d'un confort inconnu de nos jours, s'alignaient, dans une symétrie parfaite, jusqu'au Rhône.

Le pont du Teil, construit vers l’an 1970, en authentique pierre de Chomérac, après neuf lustres de discussions stériles reliait, au moyen d'un tramway électrique aérien, la cité du Nougat, au district industriel de l’Ardèche. A défaut d'autres bonnes volontés, la généreuse subvention accordée par Sir-Arthur-Kayett. de New-York, roi du porc salé, et gros propriétaire foncier du département. n'avait pas été étrangère à celle solution, ardemment désirée.

Deux cent cinquante usines, disséminées dans la banlieue, trituraient, journellement, des millions de kilogrammes de miel et de pistaches, répandant à travers le monde, la renommée de la pâte fameuse, qui avait fait, l’initiative intelligente de quelques ancêtres aidant, la gloire et la fortune du pays.

Hérissée de hautes cheminées, la ville jadis déshéritée, voyait s’égrener, comme autant de ruelles laborieuses, de nombreuses usines, car tous avaient. enfin compris que seul le travail crée le bien-être et l’abondance. L'amère leçon des fautes passées produisait, tardivement, ses fruits. Comme les peuples heureux, dans le calme des nouveaux jours, dans la douceur des soirs paisibles Nougat-Citv, dédaigneuse des discussions politiques, coulait des heures tranquilles, et n’avait pas d’histoire.

Une honnête aisance, régnait, au sein des familles, et, si, d’aventure, à la veillée, quelque vieillard presque centenaire, se prenait à évoquer le temps de la vie chère, dont il transmettait aux siens, le souvenir légendaire, il ne trouvait autour de lui, que des frimousses incrédules. « La vie n’est jamais chère, lorsqu on produit beaucoup d’argent… !! » disaient, avec conviction, les jeunes « businesmen ».

La guerre de 1914, elle-même, après avoir défrayé, dix ans, la chronique, n’empruntait plus que quelques lignes, aux livres de classe des écoliers d’alors. Leurs yeux d’enfants s’arrêtaient sur d’autres charniers humains, disséminés sur la terre, car, la guerre d’antan, à l’encontre de certaines paroles historiques, n’était plus, hélas, la dernière des guerres !!

Les inventions nouvelles se multipliaient, à l’infini, et les progrès imprévus de la science, toujours dressée vers l’infini et le mystère, faisaient prononcer aux peuples anxieux, cette phrase, considérée longtemps, comme un blasphème: « Qui sait… ? Peut-être, est-ce demain, que l’on ne mourra plus… ! »

Des véhicules perfectionnés de toute sorte, et de monstrueuses machines aériennes, se pourchassaient, sur les routes et dans l’air, à des vitesses telles, que l’œil avait peine à les suivre. Les écraseurs, les emboutisseurs, et les écrabouillés, bien entendu, parachevaient, avec une méritoire ténacité, l’œuvre des derniers carnages. En cela seulement, les temps antiques n’avaient point changé !

Le vieux clocher branlant, seul vestige des siècles défunts, avait sonné sur les générations actuelles, son glas égalitaire.

Les Municipalités s’étaient succédées, dotant la ville, de quelques améliorations nouvelles, comme toujours, approuvées par les uns, et critiquées par les autres.

Seuls, parmi les archives locales, de vieux papiers jaunis, que nul ne compulsait jamais, ( ainsi passe la gloire du monde ), attestaient de l’éphémère acuité des anciennes querelles.

Au champ du repos, dénommé Navet-City, dormaient, côte à côte, en bons camarades, réunis dans la paix éternelle, les ennemis farouches d’antan.

Leur souvenir, qu’ils croyaient éternel, n’avait même pas résisté aux fantaisies destructives du temps, qui rend illisibles les noms profondément gravés sur les pierres tombales, pour mieux saupoudrer d’oubli, les plus ambitieuses mémoires.

Les questions des eaux, du gaz, de l’électricité, et bien d autres encore, qui dressaient, jadis, face à face, la population et les autorités constituées, n’existaient plus qu’à l’état de dossiers poudreux, dans les combles de la Mairie. De gigantesques travaux d adduction d’eau, captaient aux pieds des Alpes lointaines, le pur courant des sources.

La Bâtie, La Laupie, qui donc se souvenait encore de ces noms là ?

Que faire, de pareils ruisselets, alors que pour alimenter l’agglomération surpeuplée, une rivière était, à peine, suffisante ?

Gens pratiques ou dressés, les Nougatiens, n'admettaient plus les demi-mesures, et, avec un chaleureux sourire, ils accueillaient, chaque année, un compteur nouveau.

En l’an de grâce 2023. tout habitant adulte des deux sexes, se trouvait pourvu, indépendamment, des huit ou dix qu’il laissait à domicile, de quatre compteurs obligatoires, portatifs. Ces compteurs, imposés par l’Etat, réglementaient au moyen de taxes et de surtaxes, quatre des principales fonctions humaines, savoir: la respiration, l’absorption des aliments ou liquides, leur évacuation, et enfin, pour éviter les fraudes, la repopulation. Ces instruments disposés sur certaines parties de l’anatomie, ne laissaient pas que d’être relativement gênantes, pour les débutants. Mais chacun ne tardait pas à se faire une raison, en vertu de proverbe connu : l’habitude rend maître ! Le gaz et l’électricité, ces terribles « éteigneurs de chandelles », s’étaient vus éclipsés, à leur tour, par la « Radialité », lumière à base de radium, d’une intensité telle qu’un tube incandescent, suffisait, pour illuminer à giorno ,tout un secteur.

Son prix extrêmement modéré, pour l’époque, de mille francs le milligram-watt, la mettait, du reste, à la portée de toutes les bourses. Et les gens, par un signe caractéristique des temps, payaient sans « rouspéter »…

L’arroseuse automobile, représentait la principale attraction du musée Municipal. Cet engin, sur le dos rebondi duquel, s’était, autrefois, exercée la verve des humoristes, après avoir eu ses heures d’incontestable utilité, alimentait la curiosité des enfants et des touristes.

Arroser, était, du reste, devenu un geste fastidieux et inutile, depuis qu’un service de télégraphie sans fil, reliait notre planète aux bureaux du Père Eternel. Chaque citoyen, pouvait, à volonté, en quelques secondes, commander une averse pour son jardin potager, ou retenir sa place, pour l’autre monde.

Mars et Venus, continuaient leur course régulière dans l'espace, tout en envoyant chaque jour, de leurs amicales nouvelles.

Ce n’était pas encore, la guerre des mondes, prédite par Wells, mais les dirigeants de l’époque, lassés par le terre à terre des conflits internationaux, ne désespéraient point d’atteindre ce résultat sensationnel.

Suivant le développement de sa ville natale, le Journal de Nougat-City, (ex-Journal de Montélimar). dont maints chantres intéressés, avaient prématurément psalmodié l’absoute, au cours du dernier siècle, tirait à cent mille exemplaires. Il demeurait seul sur la brèche, dédaigneux des morsures du temps et des hommes, ses concurrents, ou confrères successifs, ayant, hélas, vécu, ce que vivent les roses …

Les impôts directs ou indirects, ne soulevaient plus, parmi les Nougatiens, habitués au geste fatidique du parfait « cracheur », la moindre protestation.

Les douzièmes provisoires, de venaient, mathématiquement, définitifs, représentant en papier-monnaie, des avalanches de billets disparates et crasseux, que les camionneurs du temps, munis de masques asphyxiants, avaient grand peine, à « transbahuter » chez M. le Percepteur.

Un jour vint, (Arys nous l’avait dit: Un jour viendra...) où un archéologue, dégoûté de l’Egypte et des sarcophages des Pharaons (c’était, par hasard, un anglais), s’avisa de pratiquer des fouilles dans l’ancienne nécropole de Nougat-City.

Ayant mis à jour, après de laborieuses investigations, le mausolée d’un naturel de notre époque, il fit, au bénéfice des musées de Londres, une curieuse découverte. Dans les poches. en piteux état, de l'ancêtre inconnu, cet émule de Lord Abernon, ( un peu chacal, dans son genre), trouva, fort amochée, jaunie, rongée par les vers, une vulgaire feuille d’impôts.

Cette mirobolante trouvaille fit la joie de l’Académie des Sciences et le Président de la docte assemblée, avant assujetti ses lunettes, s’écria, après avoir déchiffré le grimoire :

« Voilà, Messieurs, un document qui serait de nature, à bouleverser toute notre économie politique actuelle. Dérobons-le à la curiosité publique. Ce sont vous le savez, les chiffons de papier, qui font les révolutions ! D’ailleurs, le plus élémentaire bon sens nous ordonne de tenir cette pièce pour suspecte. Comment, en 1923, nos braves aïeux ne payaient pas davantage d’impôts? Pareille veine, laisserait supposer, malgré le respect que nous professons pour leur mémoire, qu’ils étaient tous…

Le mot que prononça le sévère Président de l’Académie des Sciences, évoque une idée fort déplaisante, de nos jours, pour les maris ombrageux. Il n’effaroucha, cependant pas le sénile aréopage de crânes dénudés. Cette épithète, aujourd'hui, triviale, ayant été admise, depuis longtemps,dans le dictionnaire, et dans les mœurs.



Le Valet de Pique



P.S. — Nos lecteurs sont priés de vérifier, dans un siècle, le bien fondé de cet article.



Le Valet de Pique, « Montélimar en l’an de grâce 2023 »,
in Journal de Montélimar, 10 mars 1923.

 

A lire sur ArchéoSF:


Fantaisie montielienne - Montélimar en l'an 2000 (1921)


 



mardi 3 janvier 2023

En 2023 : Très curieuses prophéties de Thomas-Joseph Moult sur les événements contemporains

 Depuis 2016, ArchéoSF reprend les Très curieuses prophéties de Thomas-Joseph Moult sur les événements contemporains

Thomas-Joseph Moult est un auteur mystérieux. ArchéoSF a présenté quelques informations (douteuses) à son sujet (lire sa biographie).
Dans les Très curieuses prophéties de Thomas-Joseph Moult sur les événements contemporains on peut lire à propos de l'année 2023:



 
 
A lire sur ArchéoSF 

Pour lire la présentation des Très curieuses prophéties de Thomas-Joseph Moult sur les événements contemporains, cliquez ICI
Pour retrouver les prophéties des années précédentes, cliquez sur les liens :
Pour l'an 2016

Pour l'an 2017
Pour l'an 2018 

lundi 2 janvier 2023

Tout-Paris, La fée traîtresse (1903)

Le 1er novembre 1903 eut lieu une panne qui  affecta les communications télégraphiques partout dans le monde (tout au moins les journaux parisiens l'affirmèrent le lendemain). 

Le bloc-notes parisien du Gaulois s'empara de ce fait divers pour accueillir une courte anticipation, signée du pseudonyme collectif "Tout-Pari", ce qu'il se passerait 120 ans plus tard, c'est à dire en 2023, si tout fonctionnait à l'électricité: plus de communication, plus d'éclairage, plus de véhicule...  et quelques troubles à l'ordre public!

 

 

Bloc-notes Parisien

La fée traîtresse

Elle est plus que toute autre charmante ; ses regards sont de feu, sa robe est tramée de soleil, son rire est éblouissant, et elle est divinement blonde. Elle embellit notre vie à tous ; elle est la joie du monde contemporain ; elle porte un nom un peu bizarre, et où des syllabes grecques ont servi- à exprimer quelque chose de très moderne : c'est la fée Electricité.

Eh bien, cette fée si généreuse et si bonne est infidèle. Elle semble ne plus vouloir s'occuper de nous. On ne peut pas compter sur elle. Impénétrable, de toute la force de son étonnant mystère, elle nous raille…

Vous savez l'aventure qui vient d'effarer l'administration des télégraphes, et avec, elle cinq cent mille commerçants, financiers, et industriels ? Paris privé de communications pendant vingt heures avec presque toute la France du Midi, avec l'Espagne, le Portugal, l'Algérie et avec l'Amérique.

En broyant des couleurs sombres et dramatiques, je pourrai vous faire un effroyable tableau des fâcheux effets économiques qu'a dû provoquer cette cause inattendue, vous montrer les, ruines que le retard des dépêches aurait pu, en certains endroits, provoquer. Mais sans doute on a pu les éviter grâce au téléphone, qui voulait bien fonctionner par un caprice de la fée naturellement inexplicable : les caprices féminins le sont déjà, à plus forte raison celui des fées échappent-ils à notre humble logique.

J'avoue trouver l'événement, si on le considère sous un certain angle, pittoresque, singulièrement piquant en même temps que fantastique Les explications vont pleuvoir nous continuerons à ne pas comprendre.

Et voyez où notre, fâcheux scepticisme nous a conduits : personne ne voudra convenir avec moi que c'est un mauvais tour de fée, tout simplement…

Seulement, consolez-vous, ce- n’est pas le dernier. Et l'on peut deviner que la fée recommencera. Qui sait ? C'est peut-être un avertissement. Elle a trouvé que les hommes agissaient trop sans façon avec elle. Ils ne savent pas ce qu'elle, peut faire ni ce qu'elle est vraiment, et déjà ils la voudraient traiter en esclave. La fée, passez-moi l’expression, se « rebiffe ». Il est très aisé de deviner ce qui, dans pas très longtemps, se produira… Je voudrais vous le conter rapidement.

« Le 8 décembre de l'an 2023 on apprit vers midi à la Bourse des Trusts, à Paris, que depuis quelques instants des troubles étaient survenus dans le fonctionnement du télégraphe certaines communications étaient interrompues par une cause inexpliquée.

 On crut qu'elles seraient très promptement rétablies, mais à 12 heures 11’ 5" 3’’’comme on apprenait que le mal n'était pas réparé, le roi des mâchoires artificielles qui était un personnage fort connu et très Parisien, étant né non loin de là, à Berne ayant à faire parvenir à Whitetown, la plus grande cité du pôle Nord, une commande de six cent milliards de dents, décida d'expédier vers elle deux de ses meilleurs aéronefs, capables de faire du 2.000 à l'heure.

A 12 heures 16’4’1' on apprit que le téléphone ne fonctionnait plus, et que toutes les communications du télégraphe étaient coupées. La dernière dépêche reçue, et tronquée d'ailleurs, était de Chicago et annonçait que, sauf avec Paris, Chicago ne pouvait plus correspondre avec aucune ville.

Cette nouvelle se répandit dans Paris et fut accueillie avec scepticisme.

La sixième édition quotidienne du Paris-Herald, parue en huit langues vers trois heures de l'après-midi, en relatant ces faits dont elle affirmait l'authenticité, rappelait que ce phénomène ne s'était produit qu'une fois, il y avait fort longtemps, le 31 octobre 1903, à Paris même. On l'avait insuffisamment étudié à cette époque, car on ne s'en était pas fort inquiété on avait eu raison ; un pareil trouble ne pouvait durer longtemps.

La septième édition du Paris-Herald parue une heure plus tôt que de coutume, à quatre heures, était moins rassurante plusieurs tramways avaient brusquement cessé de marcher sans doute par une cause semblable à celle qui arrêtait télégraphes et téléphones

… Quelques .minutes après, Paris entier était dans la plus grande agitation. Tous les véhicules, et même les railways, étaient arrêtés implacablement. Puis, fait plus dramatique, sur tous les points de la ville, on vit s'abattre, du haut des airs, des aéronefs dont les moteurs électriques avaient subitement perdu toute force. En tombant, les plus petits écrasaient des groupes de passants, les plus vastes brisaient le fronton des monuments. Partout, dans les nacelles brisées à terre, on entendait des cris de douleur et des plaintes affreuses. Le ciel, qui un moment avant était sillonné de, dirigeables, laissait apercevoir maintenant ses routes aériennes désertes.

L'affolement général s'accrut encore quand fut tombée la nuit : impossible d'éclairer la ville, non plus que les maisons. Il y avait soixante ans déjà qu'avaient disparu les éclairages à pétrole depuis que les mines qui le fournissaient s'étaient épuisées, c'est-à-dire quelques années après qu'il eut été impossible de trouver le moindre gisement de houille. Personne ne connaissait plus d'autre lumière que la lumière électrique, qui coûtait un sou par jour à chaque contribuable éclairé par les soins de l'Etat.

L'heure du dîner vint. Il fut impossible, dans toute la cité, de trouver un seul dîner chaud. On dut se contenter de manger des mets froids.

Bien que le temps fût glacial et que, par suite de cet arrêt de l'électricité, les trottoirs ne fussent pas chauffés comme de coutume, poussés par une invincible curiosité, les Parisiens sortirent en grand nombre dans les rues qui étaient fort obscures, car le ciel était d'un noir profond.

Beaucoup de personnes, dans cette mêlée, s'égarèrent et ne purent rentrer chez elles. Quelques bons vivants riaient de ces événements bizarres, qui changeaient tant la physionomie de Paris ; mais tous les autres habitants étaient consternés et rongés d'inquiétudes.

Quand le jour parut, tout était dans le même état que la veille au soir. Alors, commença. La terreur de la famine. Comme personne ne prenait plus d'aliments qui ne fussent pas chimiquement préparés, et que les machines qui les fabriquaient ne pouvaient fonctionner, il était facile de prévoir que si, huit jours durant, l'électricité refusait de servir, Paris mourrait de faim ! Les prix des aliments montèrent très rapidement.

Le lendemain et jours suivants, la ville présenta le spectacle le plus lamentable qui se puisse imaginer. Les esprits étaient frappés de peur ; les corps souffraient du froid. A la faveur de l’obscurité, des coquins pillèrent les maisons des riches particuliers, les banques et les musées.

Le huitième jour, alors que de toutes parts, on signalait d'affreux sinistres, un espoir soudain traversa la ville. On apprit qu'un académicien des plus illustres venait, après de patientes recherches, de retrouver le secret perdu de la fabrication des bougies. Mais on fut consterné en apprenant qu'il ne possédait pas suffisamment de matière pour en faire plus d'une demi-douzaine. Au surplus n'avait-il pas encore découvert le moyen de les allumer. On voyait dans la rue, des gens qui portaient des morceaux de vieux meubles les meubles modernes étaient en acier dans l'espoir de les enflammer.

Le dixième jour, comme la ville était plongée dans le désespoir, tout à coup, par hasard, un employé de commerce qui remisait une automobile, s'aperçut que le moteur pouvait fonctionner quelques heures plus tard, l'électricité, sans cause apparente, était redevenue obéissante, la ville était éclairée, les railways roulaient, les aéronefs volaient, les télégraphes et le téléphone avaient, repris leurs communications… Paris était sauvé.

Mais on n'oublia pas cette dure leçon. On se méfia désormais de la fée Electricité et on prit contre elle maintes précautions. Il est vrai que la joie des hommes, qui étaient si heureux de ses bienfaits ne revint jamais… » 

 

Tout-Paris,« La fée traîtresse »,
in Le Gaulois, n° 9515
, 2 novembre 1903

Illustration: Albert Robida, "L'électricité, la grande esclave"
in Le Vingtième siècle - La vie électrique, 1893