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ISSN 2496-9346

mercredi 11 février 2015

Lucien Corosi, Commentaires anticipés sur les Jeux olympiques de 1936 (1932)

Lucien Corosi, déjà évoqué sur ArchéoSF pour Henderson building (nouvelle publiée en 1937, première version du roman Le Gratte ciel des hommes heureux édité en 1949), voit sa bibliographie science-fictionnelle s'enrichir d'un nouveau texte avec "Commentaires anticipés sur les Jeux olympiques de 1936" paru dans Match : L'intran, le plus grand hebdomadaire sportif, n° 31. 
Le journaliste imagine avec quatre ans d'avance les résultats des jeux olympiques de Berlin avec humour et lance quelques piques contre le culte de performance, les dérives du sport, les institutions olympiques.


Commentaires anticipés 
sur les Jeux olympiques de 1936


Berlin, août 1936 (de nos envoyés spéciaux)

Les Jeux de 1936 viennent de mourir, vivent les Jeux de 1940 ! Avant de les enterrer, jetons un coup d'oeil sur les résultats obtenus qui, comme vous le savez bien, étaient tout à fait inférieurs à l'attente générale.
Passons aux résultats. Le Peau-Rouge Kiririko a gagné le 100 et 200 mètres dans les temps misérables de 9" et de 19" 6/10. Une honte !
Les athlètes européens se sont assez bien comportés en remportant deux quatrièmes, quatre cinquièmes et trois sixièmes places. La sixième place de Rochard à 5.000 mètres est particulièrement brillante et montre l'immense progrès de notre athlétisme.
La lutte Japon-Chine pour l'hégémonie mondiale s'est terminée (comme nous l'avions prévu) par une victoire écrasante des athlètes mongols. Malgré ses neuf ans, le gosse You-Tchou-Tchout-chourou a gagné le saut en hauteur (9 m. 68), le disque (59 m.), le décathlon (12.000 points) et le 800 mètres (1'34").
Pour la deuxième fois, l'Irlandais O' Callaghan a gardé son titre de champion olympique de marteau, avec un jet respectable de 62 mètres. Si ses progrès ne s'arrêtent pas, on peut espérer que O'Callaghan, qui n'a que cinquante ans, atteindra, avant sa mort, le 100 mètres.
L'Amérique doit son unique victoire au sauteur en hauteur Weissbrun. Toutefois, ce dernier n'est qu'un Suédois, naturalisé Américain à la toute dernière minute.
Il serait enfantin de prendre au sérieux les épreuves de la natation au moment où le doyen des vainqueurs vient d'avoir huit ans. C'est une gosse charmante qui ne quitte jamais la jupe de sa mère et qui demandait à notre Taris avant le départ d'une série de 1.500 mètres : « Dis donc, grand-père, pourquoi as-tu fait couper ta barbe ? » Taris fut visiblement troublé par la question et Hermant prétend que sa brusque élimination devait être due à cet incident.
Mais la grande révélation des Jeux était l'équipe des Esquimaux qui ne remportèrent cette fois que des accessits, mais dont on dit dit beaucoup de bien pour 1940.
Quant à la question de l'amateurisme, le Comité Olympique a refusé la discussion de ce problème, mais on espère qu'il s'en occupera lors du congrès en 1938 à Montevideo.
Cette fois encore, on parlait beaucoup de l'affaire Nurmi, mais les milieux bien informés estiment qu'aucune décision définitive ne sera prise avant 1940.
Pour les Jeux de 1944, le Pôle Nord, l'Afrique du Sud et la planète Jupiter ont posé leur candidature, mais pour le moment, aucun d'entre eux n'obtenait la majorité absolue.
Notre délégation quittera la capitale allemande ce soir à 9 h. 42 et arrivera à Paris par l'avion stratosphérique à 9 h. 54.


Lucien Corosi, « Commentaires anticipés sur les Jeux olympiques de 1936 », in Match : L'intran, le plus grand hebdomadaire sportif, n° 311, 23 août 1932

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