L'anticipation a existé au Canada francophone avant la Seconde Guerre mondiale. On connaît quelques auteurs comme Jules-Paul Tardivel, Napoléon Aubin, Wenceslas-Eugène Dick, Jules Jehin, Ubald Paquin, Jean-Charles Harvey, Emmanuel Desrosiers ou juste après la guerre Pierre Daignault (auteur des Aventures étranges de l'agent IXE-13 qui contient quelques numéros de SF) mais tout cela forme finalement un ensemble peu important.
Une recherche dans les archives de la Bibliothèque et Archives nationale du Québec m'a permis de lire quelques textes. Sans doute ne seront-ils pas des surprises pour les exégètes de la science fiction de nos cousins québécois mais c'est un témoignage de cette science-fiction francophone que je connais mal...
Voici un premier texte, qui est une chanson, publié en 1926 dans Mon Magazine. Il va sans dire que je ne sais absolument rien de son auteur. Le texte est accopagné d'une vignette reprenant en partie une illustration d'André Devambez réalisée pour le roman Les Condamnés à mort de Claude Farrère ( 1920) qui est une anticipation sociale.
Visitons donc la maison de l'An Deux Mille !
1.
— Dans la Maison SIECLE XXI ,
Voyez
ces gens de notre race
Entrer
par le toit opportun:
VOYEZ
TERRASSE !
Ils
sont en l'air ! Chaque avion
Vient
à la file
Se
poser à la station:
Car
c'est jour de réception
Dans
la maison de l'An Deux Mille. (bis)
2.
— Le concierge est dans l'escalier!
Mais
un grand descenseur pratique
Stoppe
juste à chaque palier,
AUTOMATIQUE.
2.
— Au premier, d'en-haut, le SALON
Moderne-style:
Madame
y trône tout au long...
Porte-t-elle
le pantalon
Dans
la maison de l'An Deux Mille ? (bis)
3.
— A La Salle à Manger, voici
De
tous les mets qui font envie.
Les
comprimés en raccourci:
MADAME
EST SERVIE!
Une
pilule est un repas!
On
s'assimile
Des
boulettes qu'on ne sent pas:
Aussi
n'y devient-on pas gras
Dans
la maison de l'An Deux Mille. (bis)
4.
— C'est un garçon pharmacien
Qui
maintenant fait la cuisine:
En
place de l'Office ancien,
C'EST
L'OFFICINE!
Pour
boire, on prend un soluté,
que
l'on s'instille
Goutte
à goutte, sans volupté:
C'est
fini la tasse de thé,
Dans
la maison de l'An Deux Mille! (bis)
5.
— De Monsieur voici le bureau:
Le
patron y cache sa face
Derrière
tout un tombereau de paperasse.
Téléphones;
diorama;
Ecran
mobile:
Il
voit tout, jusqu'à Panama...
Le
journal n'est qu'un cinéma
Dans
la maison de l'An Deux Mille. (bis)
6.
— En dessous, la chambre à coucher.
Elle
est aseptique à merveille:
Plus
d'alcôve! mais où cacher
L'AMOUR
QUI VEILLE ?
Adieu
le grand lit étouffant.
Meuble
inutile!
Jamais
l'époux n'est triomphant:
Fi
donc, on n'y voit plus d'enfant,
Dans
la maison de l'An Deux Mille! (bis)
7.
— La valetaille reste en bas:
L'aviateur,
l'apothicaire.
Bonne
à tout faire:
Puis
le jardinier; puis le chien,
Qui
dort tranquille
Devant
sa niche et ne ait rien:
Philosophe,
il se trouve bien
Dans
la maison de l'An Deux Mille. (bis)
8.
— A chaque étage un cabinet:
Bain
et toilette dans la pièce,
E
au froide, eau chaude au robinet,
Siphons
en S.
Le
liquide au bas du tuyau
Devient
stérile.
Puis
remonte de bas en haut:
Rien
ne se perd, pas même l'eau.
Dans
la maison de l'An Deux Mille. (bis)
9.
— La cave: Un stérilisateur.
Grâce
aux rayons U — V ou X ,
L'oxygène
réparateur
Brûle
et se fixe.
On
en tire des jus très bruns.
D'odeur
subtile.
Remplaçant
nos grands vins défunts :
Il
s'y fabrique des parfums,
Dans
la maison de l'An Deux Mille. (bis)
10.
— Il ne faut s'étonner de rien!
Lors
l'hygiène est si parfaite,
— C'est
la grace qu'aux gens de bien
Moi
je souhaite, —
Qu'on
ne voit plus d'enterrement
Au
domicile:
L'homme
y vit indéfiniment...
Puissions-nous
habiter vraiment
Dans
la maison de l'An Deux Mille! (bis)
Dr Imbeaux, « La maison de l'an Deux Mille », in Mon Magazine, février 1926, p 17. (Canada francophone)
Lire tous les articles des "jeudis québécois"
Merci à Guy Costes pour les compléments concernant l'illustration du texte.
Lire tous les articles des "jeudis québécois"
Merci à Guy Costes pour les compléments concernant l'illustration du texte.
Voilà un sujet qui a le mérite d'être en avance sur son temps. Peu banal pour le site "ArcheoSF"
RépondreSupprimerBonjour,
SupprimerEn effet il y a eu un bug dans la programmation du billet prévu pour jeudi 30/01 et déjà publié!
Ca c'est de l'anticipation!
Bin, oui. Hein!!!
SupprimerJe soupçonne que ce poème, malgré sa provenance québécoise, n'est pas d'un auteur du cru, mais du médecin et ingénieur français Édouard Imbeaux (1861-1943). Il faudrait pouvoir consulter les tables des matières de ses deux recueils de poèmes (_En relisant Lucrèce_ et _Sonnets dans le ciel_) pour s'en assurer, toutefois. Néanmoins, les références à l'hygiène et à l'assainissement militent en faveur d'une identification avec l'auteur français, à mon avis, ainsi que l'emploi du pseudonyme "E. X." pour désigner le poète en page 17 de _Mon Magazine_.
RépondreSupprimerMerci pour ces précisions. L'enquête continue !
SupprimerJe pense avoir trouvé la première publication du texte qui n'est effectivement pas québécoise.
SupprimerLe texte a été publié à l'origine dans L'Echo des Mines et de la Métallurgie n° 2409, 2 octobre 1913. Donc il n'est pas québécois en effet.
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