Gabriel Timmory propose en 1909 la fantaisie théâtrale A Rires d'ailes. Voici le second épisode de notre feuilleton reprenant le texte original.
A RIRE D'AILES (deuxième épisode)
On
passe
à
la
discussion
du
détail.
On
a
presque
terminé
quand
survient
M.
Francis
Robin,
candidat perpétuel
à
la
direction
de
tous
les
établissements
de
Paris,
qui
demande
à
faire
une
saison
d'été
avec
la
revue. On
le
conspue,
et
on
lève
la
séance,
non
sans
toutefois
avoir
adopté
un projet
de
scénario
de
la
dite
revue.
C'est
ce
scénario
qu'une
heureuse
indiscrétion
nous
permet
de
faire
connaître
à nos
lecteurs.
Le
voici
:
PREMIER TABLEAU. - Le théâtre représente l'immensité (mise en scène de M. Fernand Samuel)
PREMIER TABLEAU. - Le théâtre représente l'immensité (mise en scène de M. Fernand Samuel)
Une
multitude
d'aéroplanes
évolue
dans
tous
les
sens
:
aéroplanes
de
luxe
et
de
livraison,
aérobus,
aérotaxis,
etc.
LE SOLEIL. — Quelle sale invention que ces aéroplanes ! Je viens encore de recevoir un coup d'aile dans l'œil.
LE SOLEIL. — Quelle sale invention que ces aéroplanes ! Je viens encore de recevoir un coup d'aile dans l'œil.
LA
LUNE.
— Imbécile
!
C'est
de
ta
faute.
Pourquoi
les
regardes-tu
en
face?
Fais
comme
moi.
Tourne-leur
le
dos.
Cinq
heures.
Les
vrais
Parisiens
sortent
de
chez
eux
;
les
plus
notoires d'entre eux apparaissent dans le firmament.
notoires d'entre eux apparaissent dans le firmament.
M.
SAMUEL
(directeur
des
Variétés),
regardant
avec
satisfaction
les
aéroplanes
qui
se
croisent
dans
l'espace,
— Ce
défilé
à
1.200
mètres
d'altitude
est
admirablement
réglé.
Voilà
ce
qui
s'appelle
monter
une
pièce
!
M.
DE
MONTESQUIOU
(le
dépassant).
— Je
suis
décidément
le
chef
des
hauteurs
suaves.
M.
CATULLE
MENDÈS
(qui
plane
en
relisant
Scarron).
C'est
la
première
fois
que
mon
œuvre
va
aux
nues.
M.
BÉRENGER
(qui
n'a
entendu
que
le
dernier
mot).
— Les
nues
?
Il
faudra
que
je
les
fasse
habiller.
Mlle
LITVINNE
(qui
fait
une
petite
promenade
dans
un
aéroplane
de
déménagement),
— C'est
maintenant
que
je
vais
pouvoir
donner
des
notes
élevées
!
(Apercevant
Régina
Badet
qui
bondit
légèrement
à
travers
l'infini.)
— Où
courez-vous
donc,
chère
amie
?
RÉGINA
BADET.
— Je
vais
voir
de
plus
près
le
paratonnerre
de
la
Tour
Eiffel.
Eiffel.
LITVINNE.
— Peuh!
La
Tour
Eiffel,
comme
distraction,
c'est
maigre
!
RÉGINA BADET. — Que voulez-vous ? Nous autres danseuses, nous sommes comme la foudre : les pointes nous attirent.
RÉGINA BADET. — Que voulez-vous ? Nous autres danseuses, nous sommes comme la foudre : les pointes nous attirent.
On
aperçoit
aussi
les
frères
Isola
dans
leur
aéroplane
couplé
«
Paul
et
Virginie
»,
piloté
par
Marcel
Simond
;
M.
Henri
Brisson
dans
son
aéro-nef
le
«Rigole-haut».
Mme
Réjane,
très
excitée
par
le
nouveau
sport,
parce
qu'elle
prend
l'Empyrée
pour
un
homme
;
et
M.
Jacques
Inaudi,
absorbé
dans
ses
chiffres
:
il
cherche
la
solution
du
problème
suivant
:
« Etant
donnée
la
distance
de
la
Terre
au
Soleil,
calculer
celle
de
la
Grande-Ourse
au
Pré
Catelan,
et
en
déduire
l'âge
de
Sarah
Bernhardt ».
LILIANE
GREUZE
(en
passant
à
côté
de
Madeleine
Carlier),-
Je
suis
déjà
allée
au
ciel,
mais
jamais
aussi
convenablement.
MADELEINE
CARLIER,
-
C'est
très
chic
de
venir
ici.
On
nous
prend
pour
des
étoiles.
VIVIANI.
— Quel
ennui
!
Je
viens
de
les
éteindre
:
impossible
à
présent
d'allumer
mon
cigare.
(A
un
Monsieur
qui
passe
en
aéro-taxi.)
— Auriez-vous
l'amabilité
de
me
donner
du
feu
?
LE
MONSIEUR.
;—
Du
feu
?
A
moi,
Pataud
?
Vous
en
avez
une
santé ! (Il fait dédaigneusement un court-circuit pour aller retrouver son ami Mansuelle. Depuis quelque temps un élégant aéroplane majestueux suit de très près un autre véhicule, dans lequel a pris place une délicieuse blonde.)
santé ! (Il fait dédaigneusement un court-circuit pour aller retrouver son ami Mansuelle. Depuis quelque temps un élégant aéroplane majestueux suit de très près un autre véhicule, dans lequel a pris place une délicieuse blonde.)
LA
BLONDE
(tout-à-coup),
— Zut
!
Faut
relayer.
Mon
moteur
est
grippé
!
LE
PERSONNAGE
MAJESTUEUX
(saisissant
l'occasion par ses chichis et s'approchant aussitôt).-
Permettez-moi de lui offrir une petite pastille.
LA
BLONDE. — Trop aimable, monsieur. A qui ai-je l'honneur ?
LE
PERSONNAGE MAJESTUEUX. — Jean IV, roi de Cerdagne.
LA
BLONDE. — Le roi des Variétés ? Je me disais aussi : Ce monsieur
ressemble à Brasseur !
LE
ROI. — Quoi d'étonnant ? Vous ressemblez bien à Cassive !
LA
BLONDE. — Y a des chances ! Je suis Amélie, des Nouveautés.
LE
Roi. - Enchanté de vous rencontrer !
AMÉLIE.
- Et moi donc! J'ai bien connu des princes : mais, un roi, c'est
de l'avancement !
de l'avancement !
Le
Roi s'avance, en effet, jusqu'à offrir à Amélie de s'asseoir à
ses
côtés. Retenus, l'un aux Variétés, l'autre aux Nouveau
tés, ils n'ont guère eu de loisir de connaître Paris : ils décident de l'explorer ensemble, tels le compère et la commère d'une revue.
côtés. Retenus, l'un aux Variétés, l'autre aux Nouveau
tés, ils n'ont guère eu de loisir de connaître Paris : ils décident de l'explorer ensemble, tels le compère et la commère d'une revue.
Mais,
comme il faut d'abord se connaître soi-même, ils se livrent dans
l'aéroplane
à des explorations mutuelles si passionnées, que la machine bascule
et qu'ils sont précipités, à travers les airs, dans une loge de
l'Odéon.
La suite demain!
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